Mais pour moi ces projets n' ont de sens que si tous nos efforts tendent à trouver des chemins différents pour chacun car le handicap n' a pas une seule forme et c' est l' ouverture de possibles qui permet la naissance d' un autre ,échappé ,pour quelques moments sans doute, au chagrin des jours et au tourment qui l' isole et l' enferme.
J' ai choisi de travailler sur le thème « grandir « à partir de l'histoire d' une tortue car , dès que je fais un atelier avec ces enfants , je les vois enfermés dans leur carapace et avec du mal à envisager de sortir de leur coquille.J' aimais cette image de la première tortue du monde avec sa carapace morcelée et qui marche ,certes lentement ,mais chemine à sa façon.Je voulais par des métaphores leur permettre d' éprouver le plaisir d' aller vers l' autre un moment ,le temps d' une histoire autour de cette maison rose ,toute rose qu' ils ont installé dès le premier jour.Voyager dans l' espace et le temps ,habiter la peau d' un autre, permettent parfois de mettre à distance les angoisses et de jouer pour de vrai ,de passer du personnage à soi ,puis à nouveau au personnage.
J' ai beaucoup insisté sur le temps de l'improvisation et de l' écriture et sur l' incitation à la mise en mots de ce qui s' était passé avec des reprises de tout ce qui était dit et fait ,pour éviter de rentrer dans un délire ou tout se confond.C' est en effet ce qui peut être une dérive d' un projet théâtral avec » ces gamins là «, comme les nommait Fernand Deligny ,et l' artiste engagé dans cette démarche doit tenter d' en être le garant.
Carapaces calebasses, carapaces chaises,au début bien cachés ,les enfants sont allés vers le jardin bleu ou l' on apprend la même langue et ou l' on a moins peur des autres...Un voyage en couleur au pays mystérieux né de la rencontre entre des enfants différents, des artistes singuliers et une équipe éducative engagée dans une aventure inhabituelle.